Conte de Noël
La nuit d’hiver n’allait pas tarder à tomber. Un mince filet de fumée faisait ruban de la cheminée de la petite maison, en direction du ciel, tel un cordon ombilical.
C’était il y a longtemps mais pas « très longtemps », c’était à l’époque où les loups approchaient des habitations lorsque la neige couvrait leur territoire.
Ce soir là, Louison la cousette, après une journée bien remplie, s’assit sur le tabouret de bois rustique et pris le petit dernier sur ses genoux. Elle essuya d’un torchon, la confiture qui restait sur les petites joues blanches, de son chérubin, il était de santé fragile. Elle passa les doigts dans ses boucles blondes, elle ne pu résister à l’envie de lui faire un bisou sur son petit nez en trompette, qu’il essuya d’un revers de sa manche de sarrau …
- - Mais mon coquin, tu enlèves le bisou de ta maman ? Ce n’est pas gentil !
Confus, le petitou, enfouit sa tête contre la poitrine de Louison pour cacher sa honte.
- Maintenant, à ton tour d’aller dormir. Mais ce soir, je ne pourrai pas te raconter d’histoire. Tu sais que maman a encore beaucoup de travail à finir.
Elle le prit dans ses bras pour l’amener dans son lit au fond de la pièce, caché derrière un rideau.
Puis après avoir caressé sa tête pour le rassurer, elle revint s’asseoir devant sa machine à coudre. Une vieille Singer à pédale, qui lui venait d’une tante, mais qui faisait vivre la petite famille depuis bien des années.
Une longue nuit allait commencer pour elle. Demain c’était Noel, elle devait faire le sapin avant que les trois grands soient réveillés ; faire ses paquets cadeaux, avec du papier crépon récupéré depuis longtemps autour de pots de fleurs, chez la riche Madame Decroix. Une femme sans cœur et capricieuse, mais elle était une bonne cliente.
Elle se servit une nouvelle tasse de café pour tenir éveillée malgré la fatigue. Il lui semblait être fiévreuse, mais ce n’était pas le jour pour faire la difficile.
Son Fernand, qu’elle avait été si fière d’épouser, avait bien changé, il devait, en ce moment, cuver dans une taverne de la petit ville. IL était loin le temps où elle l’attendait avec impatience.
Elle déballa d’un papier de soie, une étoffe rouge écarlate toute brodée de perles, c’était la robe de Nadine, la fille de « Madame Camélia » comme l’appelait sans complaisance les enfants, à cause de son parfum entêtant dont elle usait sans ménagement. Vous l’avez compris c’est madame Decroix dont il s’agit. Elle l’a posa devant elle et rêva un instant que c’est elle qui la porterait, Tous les contes de fées qu’elle avait entendu se mélangeaient dans une merveilleuse histoire, dont elle était l’héroïne. Mais ses rêveries n’arrêtaient pas l’aiguille de courir dans le satin .
Louison avait passé bien des jours à essayer la robe de réveillon de la demoiselle, retouchant une pince ici, lâchant un peu là pour étoffer sa poitrine trop plate… pas facile de satisfaire cette poison.
Il restait juste l’ourlet des manches et elle pourrait partir livrer sa commande et avoir l’argent qui lui permettrait d’aller payer sa dette chez le boucher. Il était bien un des seuls à lui faire crédit.
….
Toute la nuit, entre deux tasses de café, après avoir livré sa robe, elle la passa à décorer son sapin, qu’elle avait caché derrière la maison ; mettre de la paille au sol pour faire croire que Père Noel avait sali avec ses rennes, des crottes en chocolat à coté des petits chaussons, et les petits travaux qu’elle avaient confectionnés depuis des mois en prévision du grand jour. Une poupée en chiffon, aux tresses de laine, pour Eugénie, un pyjama bien chaud en pilou, pour Léon, un cartable qu’elle avait trouvé et recousu et bien ciré pour Ferdinand.. Puis la lessive à finir et accrocher à coté de la cheminée pour qu’elle soit sèche demain.
Lorsque le coq poussa son premier cri, elle était épuisée, et après avoir plusieurs fois piqué du nez sur la table, elle s’en alla se coucher, mais mis elle aussi une chaussure devant le sapin. Puis elle remercia Dieu, elle y croyait de toute sa ferveur, de lui avoir donné la force d’accomplir toutes ses tâches avant le jour. Epuisée mais contente, elle s’endormit sans tarder….
…
les enfant criaient à réveiller tout le voisinage
des iiiihhh
des oooohhh
des aaahhh
Eugénie berçait sa poupée en la couvrant de bisous
Léon se pavanait en dansant avec les manches du pyjama
Ferdinand essayait déjà de remplir son cartable de noël de petites choses
Louison écouta leurs cris avec le bonheur d'une mère
elle s'accorda quelques minutes avant de se lever et d'affronter la meute et la longue journée à venir
le manque de sommeil la rendait souffrante de partout
en plus çà puait la vinasse de Fernand affalé sur le sol ,trop saoul pour monter dans le lit surélevé ,une ruse de Louison qui ne supportait plus son haleine sur elle quand ivre mort il voulait accomplir ce que la décence appelle le devoir conjugal
il faudrait rallumer le feu ,mettre le lait à chauffer ,aller ouvrir aux poules ,et toujours toute seule
destin tragique des femmes ce temps là
Maman maman maman ,,,,le père noël est passé aussi chez nous
les petits déjà barbouillés de chocolat tournaient autour d'elle comme autant de chiots affamés
Elle ,ne quittait pas des yeux son sabot vide une fois de plus on l'avait oublié, elle s'était oublié elle même ,avant elle glissait le soir une bricole dans sa propre chaussure ,,,pour l'illusion
trop épuisée elle avait oublié. Cœur gros elle se souvint des mots de sa mère qui avait eu une vie aussi dure que la sienne
" ma fille sache que dans la vie il y a ceux qui reçoivent et il y a ceux qui donnent et que çà ne s'inverse pas "
comme c'était vrai !
Elle donna un coup de pied rageur vite regretté à sa chaussure de cendrillon et plongea dans l'enfer du quotidien
c'était noël
Fabienne Maurice
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